Le produit ? Une vraie fausse question d’outils, de frameworks, de process !

Bullshit My Product
8 min readApr 14, 2021

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Dis Bullshit My Product, c’est quoi le meilleur outil pour être PM ?

Misanthropes, cyniques, vous êtes ici à la maison. Prenez un bon verre, un petit feuilleté saucisse, et décontractez-vous, dans un instant ça va commencer.

©Illuminati

Il est une question qu’on se voit souvent poser : “C’est quoi les outils d’un bon Product Manager”.

Petit aparté pour fixer les limites du débat, de façon bienveillante bien sûr !

On va évacuer un petit point de pression avant même d’aller plus loin dans le débat. Avant toute chose : on est sur un article, donc y’a pas de débat. Il y a forcément un petit futé qui va la ramener avec “bah ça dépend, t’as dit PM, et pas Product Lead, ou Head of Product, ou CPO, ou PPO, ou Senior PM”… Alors, qu’on soit clair, tout ça, c’est de l’enflerie premium inventée pour encaisser de la maille au format Super Size auprès des entreprises (cf. notre article précédent déjà une référence auprès de 2 lecteurs ! ). Si tu penses que silo et culture produit sont deux mots qui peuvent avoir une relation (même la petite amourette de fin de soirée entre Michel, Valérie et Armando) : tu peux te la tailler en biseau ! Mais hop, hop, hop ! Reste quand même… Ça fait des vues, du référencement Google, quand on va commencer à faire sponsoriser nos billets par Nord VPN, automatiquement, on va faire du blé (on croise les doigts — vu qu’on est ‘digital’ ça aide). Alors tu es le bienvenu, tu fais partie de l’aventure, mais attention, on t’a à l’œil.

Donc postulat de la vérité cosmique qui permet de se faire des amis dans le milieu du conseil :

PPO / PO / PM / Head of Product / Product Lead / CPO = PO et/ou PM.

Pourquoi “PO et/ou PM” ? Car, “PO”, c’est initialement la matérialisation du PM dans le framework Scrum. “PO”, c’est le nom que la bande de hippies à l’origine de Scrum a tout simplement donné au PM… C’est TOUT ! Il n’y a rien de plus ! Le reste c’est de la gaudriole économique pour consultant amateur d’Aqua Velva.

Ceci étant fixé, on peut en revenir à nos petites affaires… With love.

“Dis maman, C’est quoi les outils d’un bon product manager”

Après tout, c’est cette question qui vous a amenés ici…

Vaste question qu’on pourrait aborder via plein d’outils. Tiens, faisons l’exercice, juste pour le fun, de se demander via quel axe on pourrait commencer à dresser cette liste d’outils utiles au PM ?

  • Discovery ?
  • Business Strategy ?
  • Design ?
  • Décomposition en items de développements ?
  • Recette ?
  • Démos et feedbacks ?
  • Réseaux sociaux pour faire un peu de branding, se faire remarquer, et être nommé CPO d’une boîte française aux actionnaires à l’ambiance Spanghero ?

Franchement ? On s’en fout… Mais alors, on s’en contrebalance la tartine version 2.0. Pourquoi tant de négativisme me direz-vous ? Car, c’est pas là le problème… En revanche, ça vient en créer un beau, de problème.

Pourquoi cela ? A cause (entre autres) d’un biais cognitif : l’effet Dunning-Kruger.

C’est quoi qu’est-ce Dunning-Kruger ?

Merci Wikipedia

C’est tout simplement une transformation de l’information faite par notre inconscient. C’est présent dans tous nos cerveaux (on n’y échappe pas, même si on pense que nous ne sommes pas concernés). Cette courbe tend à décrire l’évolution de la relation confiance / compétence dans le temps. Le tout autour de 3 grandes phases, qu’on pourrait aisément qualifier de “phases de maturité”.

Au début, une sur-confiance caractéristique, la “montagne de la stupidité”. On pense tout savoir, et d’ailleurs à ce stade, tout le monde est con (cela dit Audiard nous a appris qu’en général, ça n’est pas complètement loufoque comme approche).

Vient ensuite la vallée de l’humilité où on se rend compte que ce qu’on sait n’est en fait que la surface des choses, une fraction infime de la connaissance. On plonge alors en sous-confiance face au champ des possibles qui s’étale devant nous (et on déprime). C’est d’ailleurs dans cette phase que nous trouvons des individus bloqués avec le syndrome de l’imposteur.

Atterrissage final sous le doux nom de “Plateau de la consolidation” : une forme de sagesse où nous reprenons confiance en même temps que notre compétence réelle se forge.

Mais où veux-tu en venir BullshitMyProduct ? Aux sentiments mon beau, et à l’humain qui reste un agrégat desdites émotions. Welcome à deux copines : la perte de confiance et la perte de contrôle. Ces deux coquines occasionnent chez nous, humains, la génération du stress. Mais voilà, notre cher petit humain adoré, il est aversif au stresse. C’est d’ailleurs la même mécanique que la peur (cérébralement parlant) et on essaye de l’éviter à tout prix. C’est pour cela qu’on évite tous d’aller se faire foutre quand on nous le demande : on ne sait où aller ! C’est effrayant quand tu y penses…

Le problème de l’outillage en Product Management

Du coup, en considérant notre petite courbe plus haut, plus j’avance dans la compréhension d’un outils, et plus je vais devoir générer du stresse, de la perte de confiance, de la perte de contrôle. Soit, la récompense est la maîtrise à long terme, mais à court terme y’a de la flipette. Et la perte de contrôle, pas le choix, ça va m’arriver en plein buffet quand la pratique ne collera pas à la théorie et que je devrai improviser (90% du temps). Hum, sauf que ça, on aime pas du tout… Et nous avons inventé une stratégie pour l’éviter : dès que nous avons abordé un outil en surface, nous passons à un autre. Grâce à ça, nous restons sans arrêt dans la montagne de la stupidité, en sur-confiance, bieeeeeeen plus confortable qu’aller jouer dans la sous-confiance un cran plus loin, mais carrément moins utile Billy.

Aucun animal n’a été blessé durant la rédaction de ce torche-balle que nous appelons article

Et voilà, tour de passe-passe et brossage de licorne : nous avons une population de “Product <please insert bullshit name here>” qui passent leur temps à switcher d’un apprentissage d’outil à l’autre, pour générer du confort, de la sur-confiance et au passage de l’égo (mais où étais-tu passé mon cher Ego, tu étais surement resté sur LinkedIn…). Bah attends, si je maîtrise 44 outils c’est pas pour épiler les kiwis, ça en impose, je suis un puit de connaissance… Marqueur intéressant : (souvent) plus votre interlocuteur s’épand sur le nombre d’outils qu’il maitrise, et plus vous pouvez mettre un billet sur un petit maquignonnage, et pas dans l’esprit Coubertin du tout.

Oui, je sais… Vu que tu es vif (et surtout que tu es encore là, à lire cette anathème…) tu te dis “mais ça serait pas le même phénomène avec les promotions ? Genre le croquant prend une promotion avant même d’avoir maitrisé son actuel poste ? Et on finit avec une pyramide des branquignoles qui grimpent sans jamais maîtriser en pensant tout savoir ? ”… Méditons sur ta question, ensemble, mais chacun de son côté…

Back 2 essentials !

Franchement ? Dans 99% des cas (on les a compté), nos outils PM servent à une seule et même chose : “modéliser le problème”. Et, franchement ? Si au bout de 72 outils qui modélisent on continue d’en inventer, c’est peut être que le nœud du problème n’est pas la façon dont on modélise ? En plus de ça, modéliser de la daube, bif bof… On n’est guère avancé.

Tadam ! C’est là tout le problème ! On accorde beaucoup trop d’importance à l’outil, on l’a vu plus haut, l’outil nous donne la sensation d’être un Etchebest du produit, il nous rassure, il gonfle notre égo… Sauf qu’avant de modéliser le problème, ça serait pas intéressant de comprendre le problème ? Le nombre de Story Maps que j’ai pu voir et qui racontaient une histoire aussi vide qu’un film d’auteur nasillard pour publique intello-prout-prout sous acide.

Même constat sur les frameworks, les process. Ça vient donner l’illusion d’un résultat garanti si on suit correctement les étapes. Combien d’entreprises répondent à “Êtes-vous agile ?” par “Oui on fait les cérémonies”… Sauf que non les copines, explorer l’inconnu c’est pas comme suivre un plan de montage de la commode Urldän. Les templates, la rigidité, c’est très bien pour le domaine du connu, là on explore l’inconnu : c’est tout l’inverse qu’il nous faut, de la liberté et de l’humain.

Et du coup ? La fin ?

PM, nous sommes des “problem solvers”, pas des “solution dealers”. Nous avons besoin de très peu d’outils (K.I.S.S.), et de beaucoup de conversations avec nos utilisateurs. Le reste ? Laissez le tomber un moment, c’est bien souvent juste une illusion, à peine une sensation qui te glisse des doigts.

Cessez de bouquiner, cessez d’écumer les webinars markétés ou de passer des certif’ où des ramollis neurasthéniques vont vous apprendre à faire ce qu’ils n’ont jamais réussi à saisir. Commencez à faire, expérimentez, plantez-vous, et apprenez réellement. “Ceux qui savent font”, c’est pas juste une phrase à balancer entre la poire et le fromage pour impressionner le petit copain de la cousine Emma, c’est une réelle culture, un truc qui doit vous animer, ça se sent dans les tripes. Votre utilisateur est unique, cessez de le considérer comme une simple case Excel.

Si l’inconnu vous fait peur, que la perte de contrôle vous effraie. Que vous vous dites “allez, je préfère apprendre encore un peu plus avant de me lancer”, ou encore “j’ai besoin que les choses soient carrées, guidées” : ne vous lancez pas. Vous n’êtes pas fait pour faire du produit. Inexorablement, vous glisserez vers du waterfall car ça vous correspond bien plus : vous commencerez à mettre en place des templates de besoin, des RDV sans vos utilisateurs mais avec votre “métier”, des plannings etc… Alors allez directement faire du waterfall, mais faites le bien en revanche. Oui le waterfall pour explorer le connu, c’est très bien quand c’est bien fait. La personne qui vous dira “waterfall c’est le passé”, il lui manque encore 2 ou 3 briques pour jouer à Tétris…

Le produit, c’est aller voir à droite, quand tout le monde va à gauche. C’est choisir la pièce noire à la pièce lumineuse. C’est aimer l’inconfort d’une Journey Map qui explose car t’avais pas prévu que le mec foutrait ton plan en l’air. Allez voir votre utilisateur, rencontrez-le, regardez-le, questionnez-le, comprenez-le : le meilleur des outils c’est la discussion.

NB : Une petite pensée à Ghislain Faverjon qui aura fourni à cet article corrections diverses et variées, nous les avions dissimulées afin de tester l’attention de nos lecteurs (important de savoir tourner un échec, en force).

Cyniquement vôtre,

Bullshit My Product

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